L’écrivain et auteur renommé Eric-Emmanuel Schmitt prête sa voix et ses mots au prince Egmont.

« Si j’étais un homme, je suivrais sa bannière partout », soupire Claire en attendant Egmont, son bien-aimé dissident. Egmont (1810) de Beethoven, dont le titre est tiré de la tragédie éponyme de Goethe, est une œuvre de résistance musicale contre un agresseur à la dérive. Il faut y voir une prise de position politique courageuse du compositeur dont la Vienne qu’il affectionnait tant était, depuis un an déjà, occupée par la Grande Armée de Napoléon. 

Au Bozar de Bruxelles, les 25 et 27 janvier 2019, avec le National Belgium Orchestra, cette résistance subversive fut menée par le chef d’orchestre Hugh Wolff. Grâce à la présence de la soprano Hendrikje van Kerckhove, qui jouit d’un succès international et interprétait pour la première fois le personnage de Claire, la révolte de Beethoven fut exécutée dans son intégralité, sans se limiter à son ouverture souvent programmée séparément.

 

Critiques

La Nouvelle République - « La musique des mots prend la parole »

Quelle émotion, ce week-end, avec l’Orchestre symphonique qui fêtait le 250e anniversaire de la naissance de Beethoven. Après une bien tempétueuse 8e Symphonie et l’air de concert Primo Amore par Marie Perbost qui, de sa voix voluptueuse, apportait grâce, fraîcheur et intensité aux tourments de l’amour blessé, la musique de scène écrite pour le drame d’Egmont de Goethe enserrait le cœur du public. Aux accents de l’Ouverture, sous la baguette enflammée de Benjamin Pionnier, se soulèvent, véhémentes, tragiques, mystérieuses, sereines, des lames d’émotion jaillies du génie du « maître des contrastes ». Et quand l’ouverture s’éteint dans un silence pesant, alors la musique des mots prend la parole. Plutôt qu’une traduction de Goethe, Jacques Vincey avait souhaité dire le texte, pétri d’humanité, d’Eric-Emmanuel Schmitt, créé en 2019. Et l’homme de théâtre qui « entend mieux les mots quand ils sont élargis par la musique », raconte d’un ton sobre qui met à vif la tragédie d’Egmont, cet homme « si humain » qui aime tant la joie et la liberté et doit le payer au prix fort. Marie Perbost, véritable rayon de soleil, donne un visage à Claire l’amoureuse qui rêve d’aventures militaires empanachées de romantisme, alors que chevauche dans les cordes la cavalerie du terrible duc d’Albe, que les cuivres somptueux sonnent l’arrivée de la soldatesque et de son cortège d’infamies et qu’enfin à l’orchestre apaisé s’ouvre le ciel qui bientôt réunira les amants dans la mort. Émouvant !



Au théâtre

- Belgique: BOZAR (2019)

- France: Opéra de Tours (2020)